Perfectionnisme universitaire : la frontière entre l’excellence et l’épuisement – Par Coralie Périard Mailloux

Le quotidien universitaire exige souvent d’excellentes performances. Plusieurs étudiant.e.s se fixent des objectifs très élevés et cherchent à exceller dans tout ce qu’iels entreprennent. Cette quête de perfection, si non-équilibrée, peut toutefois devenir lourde. Lorsque la pression s’accumule, un état d’épuisement psychologique, également connu sous le nom de burnout, peut se développer. Le burnout étudiant est un enjeu de plus en plus reconnu dans l’enseignement supérieur. Nombreuses sont les études qui notent une augmentation considérable du nombre de cas d’épuisement chez les étudiant.e.s. La sévérité est d’une telle ampleur qu’elle a mené l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à reconnaître le burnout comme un réel problème de santé depuis 2019 (Organisation mondiale de la Santé, 2019).

Le perfectionnisme : qu’est-ce que c’est?

En psychologie, le perfectionnisme se définit comme étant une tendance à viser des standards de performance très élevés, voire trop élevés. De plus, la personne perfectionniste entretient souvent une auto-évaluation très critique et une intolérance face à l’erreur (Ge et al., 2020). Ce trait de personnalité comporte différentes dimensions qui sont réparties en deux volets distincts : les idéaux perfectionnistes (le fait de se fixer à soi-même des objectifs ambitieux) ainsi que les préoccupations perfectionnistes (le fait de s’imposer des attentes fortement irréalistes et de se critiquer à la moindre erreur) (Université Laval, s.d). Respectivement, ces concepts portent également le nom de perfectionnisme adaptatif et perfectionnisme maladaptatif. Le premier volet renvoie à la poursuite d’une excellence personnelle accompagnée d’un état d’esprit sain et optimiste, alors que le second correspond à une peur de l’échec, un doute omniprésent de soi et des émotions négatives telles que l’anxiété et l’irritabilité (Hamelin, 2023).

Il est important de garder en tête que ce ne sont pas toutes les formes de perfectionnisme qui sont nuisibles. Avoir le souci du détail et vouloir remettre des travaux de qualité peuvent constituer un atout. Par exemple, viser l’excellence académique peut motiver un.e étudiant.e à travailler dur et à développer son plein potentiel, comme le veut Maslow avec sa pyramide des besoins. Cependant, le perfectionnisme maladaptatif, celui s’accompagnant d’une obsession des erreurs et d’une autocritique extrême, est souvent signalé comme un facteur de vulnérabilité psychologique. Ce type de perfectionnisme est associé à davantage de stress, d’anxiété et même, dans certains cas, de dépression. Ainsi, c’est plutôt le perfectionnisme malsain qui favorise l’épuisement étudiant. 

L’épuisement psychologique chez les étudiant.e.s

Le burnout étudiant désigne un état d’épuisement à la fois physique et émotionnel provenant d’un stress chronique. Initialement étudié dans le milieu professionnel, le syndrome d’épuisement peut aussi atteindre les étudiant.e.s confronté.e.s à des attentes académiques élevées et envahissantes sur le long terme. Ce syndrome se caractérise par trois dimensions : une fatigue émotionnelle profonde (se sentir vidé.e et surpassé.e par ses études et ses obligations professionnelles), un détachement face au travail universitaire (perte d’intérêt majeure, comportement de « lâcher prise » face aux cours) et un sentiment d’inefficacité personnelle (impression de ne pas être à la hauteur et de décevoir). En fait, un.e étudiant.e en burnout peut avoir de la difficulté à se lever, se sentir « au bout du rouleau » et ne plus éprouver aucune satisfaction quant à ses réussites académiques. 

L’apparition d’un épuisement découle généralement d’un excès de stress prolongé. Par exemple, enchaîner les examens et les séances d’étude sans période suffisante de récupération peut atteindre un tel niveau d’activation permanente de l’organisme que les mécanismes de repos ne parviennent plus à compenser. Au fil du temps, la fatigue s’accumule et l’efficacité personnelle diminue, ce qui, malheureusement, peut pousser l’étudiant.e à travailler encore plus « pour se rattraper », aggravant ainsi le cercle vicieux de l’épuisement (Université Laval, s.d). Parmi les symptômes les plus rapportés, il y a les troubles du sommeil, l’anxiété, l’irritabilité accrue et une démotivation générale quant aux études. Si aucune action n’est mise en place, cet état critique peut conduire à l’échec ou à l’abandon d’un ou plusieurs cours (CÉREQ, 2025).

La motivation extrinsèque : le moteur de la tension psychologique

Un élément clé est le type de motivation animant l’étudiant. La distinction entre la motivation intrinsèque (agir par plaisir et pur intérêt) et la motivation extrinsèque (agir dans le but d’obtenir une récompense ou éviter une sanction quelconque) est bien décrite (Dubes, 2022). En revanche, certain.e.s étudiant.e.s sont à la poursuite de l’excellence par passion pour leur domaine, tandis que d’autres visent d’abord à satisfaire les attentes d’autrui tels que les parents et les professeurs (motivation extrinsèque). Cette différence est capitale concernant le burnout : un perfectionnisme auto-orienté s’accompagne plutôt d’une motivation intrinsèque, ce qui évite partiellement l’épuisement. À l’inverse, un perfectionnisme influencé par le regard d’autrui s’associe à une motivation extrinsèque, ce qui augmente significativement le risque d’épuisement. En somme, un.e étudiant.e qui cherche à être parfait.e pour obtenir l’approbation d’autrui puise dans une motivation plus contrôlée, ce qui le.la rend moins résilient.e face au stress. À l’opposé, étudier par intérêt permet de construire une protection contre l’épuisement. 

Viser l’excellence sans s’oublier 

Le perfectionnisme et le burnout étudiant sont étroitement liés. Lorsqu’il devient excessif par peur de l’échec, le perfectionnisme épuise au lieu de pousser à réussir. À l’inverse, viser l’excellence par plaisir d’apprendre favorise une implication saine et durable sans pour autant nuire à la santé mentale. 

Soyez indulgent.e avec vous-même parce que l’ambition, c’est magnifique, mais jamais au détriment de votre bien-être.Bonne fin de session et profitez des vacances pour vous reposer, vous le méritez ! ☺

Texte révisé par Aya Benbacer.

Références :

Centre d’études et de recherches sur les qualifications. (2025). Devenir des sortant·es des premiers cycles universitaires : L’abandon universitaire en premier cycle. https://www.cereq.fr/sortants-universite-abandon

Dubes, M. (2022). La motivation des étudiants. Université de Lorraine.  https://sup.univ-lorraine.fr/la-motivation-des-etudiants/

Ge, S., L. Flett, G. et L. Hewitt, P. Le perfectionnisme (Fiche Psychologie-Works). Société canadienne de psychologie. (2020). https://cpa.ca/fr/psychology-works-fact-sheet-perfectionism/

Hamelin, K. (2023). Le perfectionnisme universitaire : entre exigence et vulnérabilité psychologique. Université du Québec à Trois-Rivières. https://depot-e.uqtr.ca/id/eprint/10723/

Organisation mondiale de la Santé. (2019). Burn-out : un phénomène lié au travail dans la Classification internationale des maladies. https://www.who.int/news/item/28-05-2019-burn-out-an-occupational-phenomenon-international-classification-of-diseases

Université Laval. (s.d.). L’épuisement étudiant. Aide ULaval. https://www.aide.ulaval.ca/psychologie/textes-et-outils/difficultes-frequentes/l-epuisement-etudiant/

Université Laval. (s.d.). Le perfectionnisme : quand le mieux devient l’ennemi du bien. Aide ULaval. https://www.aide.ulaval.ca/psychologie/textes-et-outils/difficultes-frequentes/le-perfectionnisme-quand-le-mieux-devient-l-ennemi-du-bien/

Image : TyliJura. (s.d). Bureau ouvrier fatigué stress [Illustration]. Pixabay. https://pixabay.com/fr/illustrations/bureau-ouvrier-fatigu%C3%A9-stress-9200139/