Réflexion sur le bonheur – Par Abigaelle Lavoie

Quand j’étais adolescente, je croyais que le bonheur était un sentiment éphémère. Dans ma tête, je voyais cela comme un château de sable : je construisais un château de sable, puis il s’effondrait. J’en reconstruisais un autre, mais celui-ci finissait par disparaître aussi. Parfois, cela était dû au courant des vagues. Parfois, c’était une personne qui l’écrasait, volontairement ou non. Parfois, c’était moi-même qui délaissais mon propre château de sable pour aller en construire un autre plus loin. 

Quand j’étais adolescente, mes châteaux étaient construits avec les petites joies quotidiennes : passer un moment avec mes ami.e.s, montrer des recettes de cuisine à ma mère, rire pendant une éternité avec mon copain, manger du popcorn en regardant un film captivant. À cette époque, ces moments me suffisaient amplement. Je construisais des châteaux un peu partout sur la plage et les vagues se faisaient rares.

Aujourd’hui, je suis une adulte et j’ai l’impression d’avoir de moins en moins d’occasions de construire des châteaux de sable. Bien sûr, j’ai encore mes quelques petites joies quotidiennes : rire au point d’en pleurer avec mon copain, manger des sushis, chanter à tue-tête, prendre un bon bain chaud, binge-watcher une bonne série sur Netflix. 

Dans la dernière année, ces petites joies quotidiennes n’étaient plus suffisantes pour faire un château de sable. Des murets ou des petites tours peut-être, mais un château en entier ? Les tours que je peinais à construire étaient rapidement détruites par l’immense vague qu’était la vie. Parfois, je me sentais tellement stressée que je n’arrivais même pas à en profiter. Je n’étais pas malheureuse, mais je ne me sentais pas particulièrement heureuse, non plus. On aurait plutôt dit que j’étais dans un état stagnant. Mes journées se suivaient et se ressemblaient : je me réveillais, je mangeais, j’assistais à mes cours, j’étudiais, je mangeais, j’étudiais et je dormais.  J’avais l’impression que la vie continuait d’avancer alors que moi, je restais dans mon coin, figée, bloquée, incapable de m’épanouir complètement.

L’année 2022 a été particulièrement difficile pour moi. Assister à mes cours me drainait toute mon énergie, réaliser mes travaux de session qui s’enchainaient les uns après les autres me prenait tout mon temps et étudier pour mes examens écourtait mes nuits de sommeil puisque je m’y prenais à la dernière minute. 

Heureusement, depuis quelques semaines, j’ai réussi à me détacher un peu des études. En fait, depuis que je suis partie en France pour mon échange étudiant, je crois que ça va mieux. J’en ai profité pour faire de longues promenades dans la ville. J’ai eu des fous rires avec mes nouveaux.elles ami.e.s. Je me suis détendue en lisant des livres que je n’avais jamais eu le temps de lire. J’ai regardé le coucher de soleil en m’asseyant sur le bord du fleuve. J’ai essayé de voyager autant que je pouvais. Tous ces moments m’ont permis de construire un immense château de sable, le plus gros depuis des semaines, voire des mois.

Cependant, il y a quelque temps, j’ai appris une nouvelle qui m’a complètement ébranlée, tel un tsunami qui est arrivé et qui a tout détruit sur son passage, y compris le château de sable que j’avais finalement réussi à construire. Plus j’y pensais, et plus les vagues s’intensifiaient ce qui ne me laissait aucune chance de construire ne serait-ce qu’une tour, ou même d’approcher la plage. Les ravages du tsunami étaient trop importants et, sur le coup, j’ai vraiment cru que je ne pourrai plus jamais faire de châteaux de sable.

Aujourd’hui, cela fait désormais quelques mois que le tsunami est passé. J’arrive finalement à comprendre que les dégâts étaient épouvantables, mais pas irréparables. Même si les vagues ont été destructrices, la seule chose qui m’empêchait de me relever était moi-même. Évidemment, le tsunami était tout à fait imprévu. Son arrivée m’a complètement déstabilisée et l’ampleur des dommages était immense.  

Toutefois, avec un peu de recul, je réussis à mettre les choses en perspective. Je réalise que c’est normal de se sentir triste ou en colère lorsqu’un tsunami, un ouragan ou une tempête arrive. Je réalise également que le temps arrange les choses, même si cela sonne un peu cliché. Je me rappelle que j’ai des proches sur qui je peux compter pour m’aider à tout reconstruire. Je suis capable de me concentrer sur le positif et de voir le bon côté des choses. Je réussis à me convaincre qu’un jour, j’arriverai à construire un nouveau château, peu importe le temps que cela prendra. 

Quand j’étais adolescente, je croyais que le bonheur était un sentiment éphémère, un peu comme un château de sable. Aujourd’hui, je crois encore en cette philosophie. Les vagues et les piétineur.euse.s sont encore là, et même plus nombreux.ses qu’auparavant, mais au moins, je continue de réussir à trouver la force de reconstruire des châteaux de sable, encore et encore. 

Texte révisé par Anaïka François

Référence

Lachmann, S. (2020, 2 octobre). [Château de sable au coucher de soleil] [image en ligne]. Pixabay. https://pixabay.com/fr/photos/le-coucher-du-soleil-mer-5621161/ 

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