Démystifier le trauma complexe – Par Florence Léonard

Au Canada, un tiers de la population a subi des expériences de maltraitance à l’enfance (Consortium canadien sur le trauma chez les enfants & adolescents, s. d.). Ces dernières peuvent inclure la négligence physique et émotionnelle, l’abus physique, sexuel et psychologique, l’exposition à la violence conjugale et l’intimidation par les pairs (Bigras et al., 2017). En comparaison à l’exposition à une seule forme de trauma, l’accumulation chronique de plusieurs expériences de maltraitance est le plus dommageable pour l’enfant et le.la rend plus vulnérable à des abus futurs (Arata et al., 2005; Bigras et al., 2017). Dans les dernières années, le terme « trauma complexe » a gagné en popularité, notamment afin de mieux représenter le vécu des personnes ayant subi une accumulation de traumas à l’enfance. 

Bien qu’il n’existe pas de consensus scientifique quant à la définition du trauma complexe, il est généralement défini comme étant l’expérience chronique de plusieurs évènements traumatiques durant l’enfance (Kliethermes et al., 2014). Ces traumas surviennent généralement dans le cadre de relations interpersonnelles, telles que les relations parentales. Ainsi, le trauma complexe se distingue du trouble de stress post-traumatique (TSPT), puisque ce dernier peut survenir suite à l’exposition à un seul événement traumatique. Les conséquences engendrées par le TSPT et le trauma complexe diffèrent également (Courtois, 2004). Comme le trauma complexe débute nécessairement à l’enfance, il nuit grandement au développement du.de la jeune, qui peut adhérer à une vision très négative de soi et du monde en raison de la maltraitance subie. Par exemple, l’enfant peut ressentir beaucoup de honte et de culpabilité (Courtois, 2004).  Les survivant.e.s de trauma complexe peuvent également présenter des difficultés relationnelles, des déficits cognitifs et attentionnels, une dysrégulation émotionnelle et comportementale, des problèmes médiaux, ainsi que des symptômes dissociatifs (Kliethermes et al., 2014). En résumé, les impacts multiples du trauma complexe continuent de s’observer à l’âge adulte et affectent de nombreuses sphères de la vie.

Par ailleurs, certains facteurs peuvent favoriser la résilience des personnes ayant subi des traumas. D’abord, le fait d’avoir des parents engagés, soutenants et encadrants constitue un important facteur de protection face aux manifestations plus sévères du trauma complexe (Valentino et al., 2010). Également, suite aux traumas subis, il importe d’offrir à l’enfant un espace bienveillant et sécuritaire pour exprimer ses émotions, être validé.e et soutenu.e. Ceci permet à l’enfant de développer des stratégies d’adaptation saines et d’éviter certains comportements à risque, tels que l’abus de substances ou l’automutilation (Kliethermes et al., 2014). Enfin, à l’âge adulte, la psychoéducation peut aider les survivant.e.s à comprendre les traumas et leurs impacts, et ainsi mieux comprendre leur propre vécu (Courtois, 2004).

Pour conclure, il importe de continuer à sensibiliser la population quant à l’existence du trauma complexe. Même si ce dernier n’est pas considéré comme un trouble selon le DSM-5, il engendre de nombreuses conséquences chez les personnes victimes. Ces impacts ne sont pas négligeables, puisqu’en plus d’affecter le fonctionnement au quotidien des survivant.e.s, ils peuvent générer une grande détresse. Espérons que les recherches futures continueront de s’attarder au trauma complexe, afin de mieux le démystifier et de trouver de nouvelles pistes d’intervention visant à favoriser le bien-être des survivant.e.s de trauma. 

Texte révisé par Camille Simard

Références

Arata, C. M., Langhinrichsen-Rohling, J., Bowers, D. et O’Farrill-Swails, L. (2005). Single versus Multi-Type Maltreatment. Journal of Aggression, Maltreatment & Trauma, 11(4), 29–52. https://doi.org/10.1300/J146v11n04_02 

Bigras, N., Godbout, N., Hébert, M. et Sabourin, S. (2017). Cumulative Adverse Childhood Experiences and Sexual Satisfaction in Sex Therapy Patients: What Role for Symptom Complexity? The Journal of Sexual Medicine, 14(3), 444–454. https://doi.org/10.1016/j.jsxm.2017.01.013 

Consortium canadien sur le trauma chez les enfants & adolescents. (s. d.). Les objectifs de notre consortium. https://www.traumaconsortium.com/fr/ 

Courtois, C. A. (2004). Complex trauma, complex reactions: Assessment and treatment. Psychotherapy: Theory, Research, Practice, Training, 41(4), 412–425. https://doi.org/10.1037/0033-3204.41.4.412 

Kliethermes, M., Schacht, M. et Drewry, K. (2014). Complex Trauma. Child and Adolescent Psychiatric Clinics, 23(2), 339-361. https://doi.org/10.1016/j.chc.2013.12.009 

Pixabay. (2016). Femme Regardant La Mer Tout En Étant Assis Sur La Plage [image en ligne]. Pexels. https://www.pexels.com/fr-fr/photo/femme-regardant-la-mer-tout-en-etant-assis- sur-la-plage-247314/ 

Valentino, K., Berkowitz, S. et Stover, C.S. (2010). Parenting behaviors and posttraumatic symptoms in relation to children’s symptomatology following a traumatic event. Journal of Traumatic Stress, 23, 403-407. https://doi.org/10.1002/jts.20525

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