Ces amitiés que l’on perd de vue – Par Charlène Morier

La mi-février célèbre la journée de l’Amour et cette année, fidèle à mes quétaines habitudes, je compose un doux message pour mon valentin. Soudainement, une vague de souvenirs émerge dans mon esprit : je vois ma petite tête frisée distribuer des cartes de couleurs rose et rouge à mes amies dans la cour d’école avec des cœurs en bonbon pour leur dire à quel point je les apprécie. À l’époque, c’était elles mes valentines, car elles occupaient une place importante dans ma vie. Aujourd’hui, leurs visages ne font que teinter mes souvenirs et illustrent mon hier.

Je me perds dans le film de mon passé afin de comprendre où est la rupture expliquant pourquoi j’ai soudainement le cœur chargé d’émotions. Que s’est-il produit pour que ces merveilleuses personnes ne figurent aujourd’hui que dans mes albums photos et non plus dans ma vie ? Il me semble que la réponse est plutôt simple : c’est ainsi que va la vie ! On rencontre plusieurs belles âmes durant notre parcours, certaines vont continuer à faire partie de notre vie, alors que d’autres ne font que momentanément croiser notre chemin. On s’abreuve de ce que ces belles âmes ont à nous transmettre, puis on se perd de vue. Parfois, par le fruit du hasard, on croise des années plus tard ces anciennes amitiés, mais sous la forme d’un.e étranger.ère que nous avons connu.e par le passé.

Dans ma nostalgie, j’ai le cœur gros, car je réalise que les gens vont et viennent. Cela vaut également pour les personnes que j’ai vraiment aimées durant un moment de mon existence. Nos choix respectifs nous séparent de gens formidables qui deviendront les acteurs et actrices de nos anecdotes dans les prochaines années.

Ces amitiés perdues, on doit en faire le deuil. En effet, le deuil n’est pas uniquement réservé pour la mort ! Il se vit pour un éventail d’acceptations difficiles que l’on doit parfois faire au cours de sa vie. On peut vivre un deuil de ce que l’on perd, de ce que l’on n’aura jamais ou encore de ce que l’on a, mais pas de la manière souhaitée. Les personnes dont on s’éloigne tranquillement, sans raison particulière, jusqu’au jour où leur absence devient quelque chose d’habituel, on en fait une forme de deuil lente et inconsciente. On prend de leurs nouvelles par l’entremise de leurs profils sur les réseaux sociaux et puis c’est tout.

Un jour, quelqu’un m’a dit que sa plus grande peine d’amour fut lorsque sa meilleure amie décida de rompre les liens les unissant. Une rupture amicale peut nous faire autant souffrir qu’une rupture amoureuse, car, après tout, c’est presque le même type de relation à défaut de la composante sexuelle (Bons, 2018). Une amitié qui se termine, c’est un gros morceau arraché à notre sentiment d’appartenance, car comme on l’entend souvent : les ami.e.s sont la famille que l’on choisit. Il y a des fins d’amitié douces et graduelles provoquées par un écart subtil se creusant au fil des différents choix que chacun.e prend. Puis, il y a des fins qui sont moins agréables, pour diverses malheureuses raisons, nous obligeant à prendre nos distances avec la personne concernée. Lorsqu’on vit le rejet d’un.e ami.e, on peut développer des insécurités qui auront des répercussions sur nos prochaines relations. Cela explique en partie pourquoi le deuil qui s’ensuit est douloureux, puisqu’il représente une remise en question de soi : qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans cette relation non mutuellement exclusive ? Cette période de chamboulements internes nous encourage à identifier les points négatifs ayant contribué à la perte de cette amitié afin de ne pas les reproduire à l’avenir. Ainsi, le deuil est un cheminement qui vise à aboutir à l’acceptation que quelque chose ne fait dorénavant plus partie de notre vie. Il consiste en une série d’étapes essentielles à traverser afin de se sortir grandi.e.s de nos « échecs relationnels ». Il permet d’accepter qu’une personne avec laquelle on s’est énormément investi.e. ne continuera pas d’avancer sur notre route. Il faut donc se laisser le temps de cicatriser lors du processus de deuil d’une relation amicale.

Aujourd’hui, j’ai revisité de beaux souvenirs en me rappelant toutes mes amies d’hier, celles pour qui je prenais le temps, le 14 février, de souligner ma reconnaissance de les côtoyer. J’ai appris de chacune de ces amitiés et je retiens qu’elles ont toutes contribué à forger la personne que je suis actuellement. Oui, j’ai éprouvé de la tristesse de ne plus partager mes aventures avec ces personnes, mais la vie est ainsi faite, nous devons accepter que certaines routes se croisent et ensuite se séparent. Le motif derrière le fait que nous soyons aujourd’hui étrangères m’importe peu, car au final, elles demeurent les valentines de mes souvenirs, celles à qui je pouvais laisser mes petits cœurs à la cannelle et celles qu’il me fera toujours plaisir de saluer dans la rue.  

Révisé par Charles Gervais


Références :

Bons, L. (2018, 11 septembre). Pourquoi une rupture amicale fait-elle aussi mal et comment s’en remet-on ? LCI. https://www.lci.fr/psycho/pourquoi-une-rupture-amicale-fait-elle-aussi-mal-et-comment-s-en-remet-on-conseils-pour-surmonter-la-douleur-solitude-2097746.html

Yarns. (s. d.). 3 things to do when a friendship starts to fade [image en ligne]. Tiny buddha. https://tinybuddha.com/blog/3-things-to-do-when-a-friendship-starts-to-fade/?fbclid=IwAR11weARiTZXaXx9CZvQl3kVxs5asVN_ao-g58bPZ34ezl_W3Z_GstXhfvs


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